G.R.I.L* et A.M.E 49
JOURNEE D’ETUDE DU 13-06-01
* Groupe de Recherche sur l’Illettrisme
CONFERENCE DE JEAN ECALLE ET ANNIE MAGNAN
CHERCHEURS - UNIV. LYON II-
"Apport de la psychologie cognitive à la compréhension des difficultés d’acquisition "
I-INTERVENTION D’ ANNIE MAGNAN.
Ses travaux portent sur les connaissances et les traitements phonologiques.
L’enfant doit posséder une base phonologique ( une conscience phonologique ) pour entrer dans l’apprentissage de la lecture.
Ce sont les travaux sur cette conscience phonologique qui sont présentés ici, son évaluation et son entraînement.
On pourra également parler de la médiation phonologique (ou recodage) : traitement syllabique sur les unités et traitement analogique.
L’intérêt s’est porté sur les travaux avec les enfants sourds ( qui compensent le manque d’indices phonologiques par d’autres indices ) et sur les travaux interlangues.
L’apprentissage dépend à la fois du fonctionnement cognitif des sujets, de la situation d’enseignement et du contenu à acquérir( langue ).
Signes graphiques Situation en classe
Fonctionnement cognitif
C’est le résultat d’une interaction entre le contenu de la tâche, le fonctionnement cognitif et la situation.
Méthode de recherche de la psychologie de terrain.
_________________
En classe
_________________
Laboratoire
CLASSE
______________
Solution effective hypothèse
Léonard –91 –
Il faut sortir le problème de la classe pour l’étudier à l’extérieur, pour monter une expérience avec contrainte de revenir sur le terrain et de donner une solution ou, au moins une réponse.
Question sur la dyslexie:
Définition de la dyslexie : l’enfant dyslexique est un enfant qui a de 18 mois à 2 ans de retard d’apprentissage de lecture. On ne peut parler de dyslexie avant l’âge de 8 ou 9 ans.
Rappel des 2 sortes de dyslexie : -dyslexie phonologique( hypothèse la plus répandue : troubles de la perception de la parole avec problème des contrastes phonologiques )
-dyslexie de surface.
Il existe 3 domaines d’approche de la dyslexie :
-approche psycho-affective
-approche cognitive
-approche neuro-psychologique ( Réf. "La dyslexie au cerveau singulier " -M.HABIB- )
Les travaux récents sur la neuro-imagerie (GALABURDO ) portent sur trois caractéristiques de l’anatomie : -la taille du corps calleux.
-la forme du corps calleux.
-la réduction de l’asymétrie du cortex temporal.
La dyslexie peut s’installer après une dysphasie mais aussi sans dysphasie.
II – INTERVENTION DE JEAN ECALLE.
Ses travaux portent sur le développement des habiletés phonologiques et l’apprentissage de la lecture. ( étude longitudinale G.S.-C.P. )
Les habiletés phonologiques concernent le traitement des unités linguistiques de la parole.
Cela suppose une décentration.
Il s’agit de comparer et de manipuler des sons en dehors du sens des mots.
Les liens entre habiletés phonologiques et acquisition de la lecture sont des relations fortes et spécifiques.
Les habiletés phonologiques sont la cause et la conséquence de l’apprentissage de lecture, et aussi un bon prédicteur de réussite.
Le constat a été fait dans plusieurs langues très différentes : anglais, italien, suédois, danois, français, arabe.
1. Liens entre apprentissage de lecture et habiletés phonologiques :
Il existe 2 théories sur le développement des liens entre les unités phonologiques et les unités orthographiques.
_____________ ____________
Théorie des théorie des
Grandes unités petites unités
Goswani-99- Ehri –97-
_____________ _______ Seymour –99-
Syllabe ____________
/ tract/
______ _______ _____
body rime
/tra/ /act/
______ _____
______ ____ _____
attaque pic coda
/tr/ /a/ /ct/
______ ____ _____
________ ________ ________ ________ ________
phonème phonème phonème phonème phonème
/t/ /r/ /a/ /c/ /t/
________ ________ ________ ________ ________
______________ ________________
traitement traitement
épiphonologique métaphonologique
______________ ________________
L’évaluation des habiletés phonologiques s’élabore avec diverses tâches :
Constats : -gradation dans les compétences phonologiques au cours du développement.
-progression des unités larges vers des unités réduites (phonèmes).
-des paradigmes expérimentaux sollicitent différents niveaux de traitement.
-les habiletés phonologiques se situent sur un continuum.
Il est donc nécessaire d’opérer une distinction entre les processus aux statuts cognitifs différents.
Dans le développement des habiletés phonologiques, on va passer des connaissances implicites opérationnelles vers des connaissances explicites sur la langue, objet de réflexion.
2 niveaux de traitement : Gombert-92
instruction liée à la langue écrite
______________ ________________
traitement traitement
épiphonologique métaphonologique
______________ ________________
des unités de parole consciente des unités
Développement des habiletés phonologiques.
Position de JEAN ECALLE :
Chez les prélecteurs, le traitement épiphonologique est antérieur au traitement métaphonologique.
Avant l’enseignement formel de l’écrit ( C.P. ) ces deux types de traitements sont dépendants du type d’unités et de leur position ,or le traitement est plus facile quand les unités sont larges et en position initiale. Sous l’effet de l’enseignement de l’écrit, les 2 types de traitements vont se développer et leur différence va diminuer.
Dès le milieu du C.P. , la lecture est liée au traitement métaphonologique car elle concerne plus précisément le traitement des unités réduites.
Le traitement métaphonologique est donc lié au traitement épiphonologique.
Description de l’expérience :
Trois séquences ont été menées en G.S. et en C.P.sur 36 enfants :
Tâches :
-une tâche épiphonologique : 2 mots sur 4 avec une unité commune.
-une tâche métaphonologique : extraction d’une unité commune à 2 mots.
-une tâche épiphonologique : identification de mots écrits.
-une tâche non verbale : les cubes de Kohs.
Facteurs manipulés :
-types de tâches : épiphonologie vers métaphonologie.
-types d’unités : syllabes, unités infra-syllabiques, phonèmes.
-positions des unités dans les mots : initiale et finale.
Toutes les tâches ont des supports images.
Résultats :
-Evaluation des scores en G.S. et C.P. dans les traitements épiphonologique et métaphonologique :
le traitement épiphonologique est supérieur au traitement métaphonologique et la différence est plus grande en G.S. qu’en C.P.
-Effets de la position des unités :
-dans le traitement épiphonologique, pas d’effet en G.S. et en C.P.
-dans le traitement métaphonologique, position initiale : 57,6% en G.S. et 77,5% en C.P.
position finale : 47,8% en G.S. et 65,5% en C.P.
-Evaluation des scores sur les types d’unités :
1-dans les tâches épiphonologiques : les phonèmes sont moins bien traités que les infra-syllabes et que les syllabes, la différence diminue de la G.S. au C.P.
2-dans les tâches métaphonologiques, la réussite est supérieure pour les phonèmes et les syllabes, elle est différente en G.S. et identique en C.P. Les infra-syllabes sont plus faibles mais évoluent pendant l’expérience.
2 . Liens entre lecture de mots et habiletés phonologiques :
Test : - évaluation des capacités de recodage .
-mesure du lexique orthographique.
-connaissance orthographique chez les enfants apprentis ( connaissance implicite )
Remarque : 3% des enfants en début de C.P. ont le même niveau d’identification des mots qu ‘en C.E.2.
*Les nombres précédés d’un point sont les indices de corrélation .
____________ Cubes de Kohs
____ _____________
.33 ________________
____________________ ____ Epiphonologie G.S.
________________
Lecture de mots _________________
Métaphonologie G.S.
Recodage phonologique _________________
____________________ _______________
Epiphonologie C.P.
55% ____ _______________
.61 _________________
____ Métaphonologie C.P.
_________________
Ce sont les enfants de C.P. en métaphonologie qui ont les meilleures performances ( c’est donc bien la manipulation consciente qui permet de décoder) avec la variante intellectuelle de la logique non verbale (cubes de Kohs ).
________________
___ Phonème initial
.46 ________________
___________________ ___ Phonème final
Lecture de mots ________________
___ Infra-syllabe initiale
Recodage phonologique .54 ________________
___________________ ___ Infra-syllabe finale
60% ________________
Syllabe initiale
________________
Syllabe finale
________________
Les résultats sont cohérents car la tâche est identique.
Comment expliquer les performances en métaphonologie en C.P. par rapport aux performances en épiphonologie ?
_________________
Cubes
77% ___ _________________
_________________ .51 épiphonologie G.S.
métaphonologie C.P. ___ _________________
_________________ ___ métaphonologie G.S.
.45 _________________
___ épiphonologie C.P.
_________________
Applications pédagogiques
Pour un entraînement précoce des habiletés phonologiques, il faut prendre en compte :
-le niveau de traitement (l’épiphonologie est différente de la métaphonologie )
-le type des unités phonologiques et leur position.
-la tâche impliquée ( plusieurs tâches sont nécessaires ).
Pour les interventions, il faut s’appuyer sur :
-l’apprentissage explicite.
-l’apprentissage implicite avec la réalisation d’une tâche contrainte différente d’une tâche phonologique.
Avant, il conviendra d’évaluer la base des connaissances phonologiques de l’enfant pour mieux cibler l ‘intervention. La base se situe sur 2 niveaux : la sensibilité à des unités partagées (épiphonologie ) et la capacité à distinguer des syllabes (métaphonologie ).
Le principe de l’entraînement à l’apprentissage implicite consiste à ne pas centrer l’enfant sur une tâche phonologique mais sur une autre tâche. ( exemple du jeu des ballons : le travail se situe sur l ‘ensemble des oppositions phonologiques comme " pa " et " ba " et le choix de la syllabe est associée à un tri de ballons.)
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QUESTIONS
-1- Est-ce que la base des connaissances phonologiques a une relation avec le langage ?
Est-ce qu’on évacue complètement le sens des mots ?
Le sens du mot n’est pas pris en compte mais le stockage des mots se fait sur cette base et le développement du lexique se construit avec le sens ( sans rôle prioritaire ).
Les processus de compréhension ne peuvent se reposer que sur les processus d’identification des mots.
Le développement du lexique participe à l’élaboration et la spécification phonologique.
Le décalage temporel dans les stratégies d’acquisition ne vient pas du niveau de langage : dans la comparaison entre enfants de milieux très différents, le départ est le même , les réponses données sont du même type. Les enfants fonctionnent de la même façon , la différence se fait avec l ‘apprentissage et le décalage s’installe peu à peu après.
Il n’y a donc pas de déviance mais du retard pour les mauvais lecteurs.
On parle de dyslexie à partir de 8/9 ans sous certaines conditions ( psychologiques, sociales, déficitaires ) pour des enfants à risque ( faible niveau de connaissances phonologiques ) .La dyslexie n’est définie qu’après persistance des problèmes et le retard devient une déviance.
L’estimation des dyslexiques se situe entre 3 à 6% et 5 à 10% sur 20 à 25% de mauvais lecteurs.
Il existe un centre d’évaluation des difficultés d’apprentissage à Lyon ( Hôpital E.HERIOT ) où on pratique différents types de bilans :-bilan orthophonique.
-bilan neuro-psychologique.
-bilan électro-physiologique.
-bilan O.R.L.
-2- Applications pédagogiques des habiletés phonologiques . Rôle du pédagogue. Construction du matériel .
Ce type d’entraînement doit être ciblée sur les populations d’où la nécessité d’une évaluation fine au départ (diagnostic ).
Il existe deux types d’aides au niveau pédagogique :
-aide directe : l’adulte assure la remédiation .
Des attitudes facilitatrices, des sollicitations et des incitations peuvent contribuer à ce dispositif d’aide mais il faut veiller à l’inadéquation de certains enseignants (professeurs de collège face aux problèmes de lecture )
-aide indirecte :
Les enseignants spécialisés peuvent assurer un suivi avec un enseignant dans un cadre défini ou une activité . Pour un entraînement phonologique en G.S., un maître E peut accompagner l’enseignant de la classe ( Cf. A.FLORIN :l ‘enseignant spécialisé aide l’enseignant de la classe à mettre en place des groupes conversationnels )
Les maîtres E peuvent être " incitateurs " : ils pourraient évaluer la base de connaissances puis proposer des remédiations par des entraînements.
-3- Approche psycho-sociale.
-impact de l’exposition à l’écrit à travers un test de reconnaissance de titres ( travaux d’un D.E.A )
-impact des interactions parents/enfants sur l’acquisition du Lire/Ecrire.
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REFLEXIONS SUR UNE PARTICIPATION DE L'AME 49
A UN PROJET DE RECHERCHE AVEC J.ECALLE, A.MAGNAN
Rappel de l’importance du facteur verbal dans la réussite scolaire : travaux d’A.FLORIN sur les interactions langagières en Maternelle
Présentation préalable de 2 types de travaux :
-1-études d’indices comportementaux :
3 indices retenus : -niveau de langage (sans outil )
-capacité d’attention
-capacité à réaliser des travaux (rythme soutenu et contraint)
3 groupes dégagés : forts – moyens – faibles –
Ces groupes se distinguaient sur des habiletés phonologiques , c’est le groupe des forts qui a eu une meilleure réussite . .
Ces indices pourraient servir à repérer des groupes sur la conscience phonologique.
-2-étude longitudinale sur 3 ans : évaluation en G.S. , C.P. , C.E.1. sur la prédiction . 5 facteurs : -compréhension de la langue ( O.20 )
-connaissance des mots
-comportement (L.A.R. : Langage-Attention-Rythme-)
-facteur non-verbal (P.A.M.S.)
-concept de langue (N C L )
Résultats :les prédictions des enseignants qui s’appuient sur le comportement ( L.A.R.) sans aucune valeur objective se révèlent conformes aux conclusions de l’étude longitudinale sur la réussite dans l’acquisition des mots en fin de C.E.1.
Conclusion : Il y a de très fortes relations entre les évaluations réalisées
avec des outils fiables et la perception des enseignants .
Proposition de recherche sur le terrain :
Il s’agirait de coupler une évaluation des habiletés phonologiques chez les prélecteurs avec l’échelle L.A.R. proposée aux enseignants .C’est une recherche qui pourrait s’accompagner de remédiations .
Une évaluation phonologique pourrait être proposée à 2 moments différents de l’année, une évaluation épiphonologique ( passage par petits groupes ) et une évaluation métaphonologique ( en individuel ) en G.S. et en C.P.
Dans un premier temps, il faudrait repenser et clarifier l’expérience. Ensuite, il serait nécessaire de réaliser un outil adéquat et d’élaborer un étalonnage avec beaucoup d’enfants .Une version simplifiée de l’outil pourrait être envisagée avec des épreuves un peu différentes de celles réalisées pendant les travaux de recherche.
Principes de la recherche :
-échanges
-gratuité
-modalités à négocier avec les supérieurs hiérarchiques ( I.E.N. )
-étude de faisabilité avec H.Bouchafa. ( formation pour la recherche, étudiants en psychologie, matériel, etc…)
Thème:
Est-il possible de coupler une évaluation des habiletés phonologiques (épiphonologiques et métaphonologiques) avec un questionnaire proposé aux enseignants?
Modalités:
Evaluation en mars-avril (GS) : passation "épi" en petits groupes
Evaluation en novembre-décembre, puis février -mars (CP): passations "méta" individuelles.
Un calendrier de mise au point de ces travaux a été élaboré. Les prochaines réunions devraient faire avancer ce projet